10 AVRIL 1994: LES TUEURS CONTINUENT L’EXTERMINATION DES TUTSI DANS TOUT LE PAYS
Le 10 avril 1994, le gouvernement criminel a continué à mettre en œuvre son plan génocidaire d’exterminer les Tutsi dans tout le pays.
La Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG) continue à rappeler les faits marquants du génocide, comment celui-ci a été mis en œuvre au quotidien, et ci-après comment il a été exécuté à travers le pays, le 10 avril 1994.
1.Les Français ont continué d’assister le gouvernement génocidaire de Jean Kambanda
Les évacuations vers Paris ont continué, 94 orphelins (essentiellement des enfants de militaires des FAR) de l’orphelinat Sainte-Agathe, patronné par Agathe Kanziga, épouse du président défunt étaient évacués via Bangui vers Paris.
Ils étaient accompagnés par 34 personnes dont l’identité n’a jamais été révélée.
Le 10 avril 1994, Jérôme Bicamumpaka, ministre des affaires étrangères du gouvernement de Jean Kambanda, rencontre l’ambassadeur de France au Rwanda, Jean-Michel Marlaud, et lui demande l’intervention des forces françaises pour « contrôler la situation», ce qui signifie l’intervention directe aux côtés des forces armées rwandaises dans les combats contre le FPR. La France ne demande pas l’arrêt des massacres, ce qui pour les génocidaires leur donne un appui moral pour les poursuivre.
2.Les évêques catholiques se disent attristés par la mort de Habyarimana, mais ne dénoncent pas le génocide contre les Tutsi
Dans un communiqué rédigé le 10 avril 1994 par Mgr Thaddée Nsengiyumva, évêque de Kabgayi, et publié en français dans le journal de l’Eglise catholique romain l’Osservatore Romano, les évêques catholiques du Rwanda se disent consternés suite au décès de son excellence Juvénal Habyarimana et choqués « par le nombre d’assassinats perpétrés depuis ce jour ».
Ils ne parlent pas de massacres de Tutsi, mais de troubles, et ne nomment pas les auteurs de massacres.
Ils « rendent hommage aux Forces armées rwandaises (FAR) qui prennent à cœur les problèmes de sécurité ».
Ils « se félicitent de la mise en place d’un nouveau gouvernement, auquel ils promettent leur soutien. Ils demandent à tous les Rwandais d’alléger la charge des nouveaux dirigeants en répondant favorablement à leurs appels et en les aidant dans la réalisation de la tâche qu’ils ont assignée au nouveau gouvernement, à savoir : le retour de la paix et de la sécurité, la lutte contre la faim et les négociations avec le FPR”.
Il s’agit d’une prise de position claire pour les génocidaires, car, les évêques appuient une armée qui tue, et un gouvernement qui massacre la population civile Tutsi.
3. Le massacre des Tutsi dans le Secteur de Rushashi, anciennement Commune Rushashi, préfecture de Kigali Ngari
Le 10 mars 1994, de nombreux Tutsi ont été tués à Rwankuba à la paroisse catholique, près des bureaux du Secteur Rushashi où il y avait anciennement la Sous-préfecture de Rushashi et un tribunal, à Shyombwe et également au centre commercial de Kinyari. L’endroit fut appelé « CND » en 1994.
Des réunions planifiant les massacres de Tutsi ont été organisées à Rushashi, certaines chez le Bourgmestre de l’ancienne Commune Musasa, Havugimana Aloys et au bureau de cette commune, tandis que d’autres étaient organisées au siège de la Préfecture Kigali Ngali lesquelles étaient dirigées par le Préfet Karera Francois, aussi au bureau de la Sous-préfecture Rushashi, à celui de la Commune Rushashi, au Secteur de Shyombwe, à l’EAV Rushashi et au bureau du Secteur Joma.
Signalons que le préfet Karera Francois a été jugé et reconnu coupable de génocide par le tribunal pénal international pour le Rwanda. Il a été condamné à la prison à vie. Il est mort en détention.
4.Le bourgmestre de la Commune Rwamiko, et le Sous-prefet Biniga Damien ont exterminé les Tutsi au Centre de Sante de Ruramba dans la commune de Rwamiko, Gikongoro
Le 10 avril 1994, ont été tués des Tutsi qui s’étaient réfugiés au centre nutritionnel de Ruramba de la Commune Rwamiko, en la Préfecture Gikongoro. Parmi les responsables de ce massacre il y a Mugirangabo Silas, Bourgmestre de la Commune Rwamiko, le Sous-préfet Biniga Damien, Mutaganda, Conseiller de Ruramba, Gafaranga Innocent Inspecteur scolaire dans la Commune Rwamiko, Nkurikiyinka Célestin, enseignant, Kidahenda Oswald, membre des Impuzamugambi de la CDR, Kabuga Leodomir (CDR), Nkuriza Félicien, Juvenal Ndabarinze, directeur de l’usine à thé de Mata et Nkuriza Anatole, encadreur de la jeunesse.
Les réunions, organisées par les autorités et qui planifiaient les massacres des Tutsi, se tenaient au centre de Ruramba, là où actuellement un marché a été construit, et étaient dirigées par le Sous-préfet Biniga.
A Ruramba il y a un mémorial du Génocide perpétré contre les Tutsi, dans lequel ont été inhumés entre 1200 et 1500 corps de victimes.
5.Des Tutsi ont été massacrés à Ngororero, Commune Satinskyi
Du 8 au 10 avril 1994, à Ngororero là où il y avait l’ancien palais du MRND et le bureau de la Sous-préfecture Ngororero, en Préfecture Gisenyi, ont été tués de nombreux Tutsi venus des Communes Satinskyi, Ramba et Gaseke et aux alentours ; certains d’entre eux ont été brûlés vifs à l’essence dans ces bâtiments administratifs dans lesquels ils croyaient avoir trouvé cachette. De nombreuses réunions qui ont planifié ces massacres s’étaient tenues dans les bureaux de ce qui étaient anciennement la Sous-préfecture de Ngororero et les Communes Ramba, Gaseke et Satinskyi.
La plupart des Tutsi ont été tués le 10 avril 1994 et c’est cette date qui a été choisie par le District pour commémorer leur mémoire.
Parmi eux, il y a Rwangarinda Berchmans, enseignant, et sa famille, le commerçant Bizimungu Martin, la famille de Rukara et d’autres qui, après s’y être réfugiés, étaient retournés à leurs domiciles. Des Tutsi ont été rassemblés au bureau de l’ancienne Sous-préfecture de Ngororero et furent tués après des réunions organisées aux bureaux des Communes Ramba, Gaseke et Satinskyi.
6.Des militaires de Gako ont massacré les Tutsi sur la colline de Rebero, en Secteur Mayange, dans le Bugesera
Rebero est situé dans le District de Bugesera, en Secteur Mayange. En 1994, alors que le Génocide venait d’être déclenché, les Tutsi qui habitaient près de Rebero, ceux de Mayange, de Kibenga, de Mbyo et quelques-uns de Nyamata et d’autres, se sont réfugiés sur la colline de Rebero pour y joindre les Tutsi de la localité et pouvoir se défendre.
Le 8 avril 1994, de nombreux Tutsi étaient arrivés sur la colline Rebero et se rassemblèrent, et le même jour, ils furent attaqués par un groupe de tueurs mais résistèrent et repoussèrent l’attaque.
Le 10 avril 1994, des militaires venus du camp militaire de Gako attaquèrent les Tutsi qui se trouvaient sur la colline de Rebero et tirèrent sur ceux-ci. Il y eu très peu de survivants car les militaires tiraient sur eux et étaient suivis d’Interahamwe qui achevaient à l’arme blanche ceux qui respiraient encore. L’organisateur principal de ce massacre est le lieutenant-colonel Pheneas Munyarugarama qui commandait le camp militaire de Gako.
7.L’extermination des Tutsi à l’église de Gahanga, Kigali
Depuis le 8 avril 1994, alors que le Génocide avait redoublé d’intensité, de nombreux Tutsi de Gahanga et de différentes autres localités environnantes se refugièrent dans l’église de Gahanga. Ils s’y trouvaient aussi bien de Tutsi que de Hutu qui n’avaient pas encore compris qui était visé par les massacres. Le 9 avril 1994, les autorités locales et les Interahamwe demandèrent aux Hutu de sortir de l’église. Il y avait des hommes Hutu qui venaient récupérer leurs épouses et leurs enfants qui s’étaient réfugiés dans l’église. Les Tutsi n’étaient pas autorisés à sortir et le 10 avril 1994 tous les Hutu qui s’y étaient réfugiés étaient sortis, et il ne restait dans l’église que les Tutsi.
Le même jour du 10 avril 1994 les Tutsi ont commencé à être tués mais ils résistèrent et repoussèrent les Interahamwe qui clamèrent qu’ils arrêtaient les attaques et qu’ils ne reviendraient pas. C’est le Conseiller Buregeya qui a alors demandé le renfort de militaires qui viendraient tuer les Tutsi à l’aide d’armes à feu.
Le même jour du 10 avril 1994 des militaires sont arrivés et ont tiré sur les Tutsi dans l’église, beaucoup furent tués, et après les Interahamwe sont venus achever à l’arme blanche ceux qui respiraient encore. Presque la totalité des Tutsi qui étaient dans l’église furent massacrés et les rares survivants étaient grièvement blessés. Le mémorial du Génocide construit sur le site où se trouvait l’église contient plus de 7000 corps de victimes.
8. Des Interahamwe ont massacré les Tutsi à Rwinkeke, à Karambi (QUEL DISTRICT ? PRECISER).
A Rwinkeke à Karambi, en Secteur de Murundi il y avait une église catholique. Le 8 et le 9 avril 1994, de nombreux Tutsi s’y refugièrent. Le 10 avril 1994, les Hutu de la localité, appuyés par des Interahamwe venus de Murambi chez Gatete Jean Baptiste ont exterminés tous ces Tutsi et les jetèrent dans des fosses latrines qui avaient été creusées près de l’église. A la tête des tueurs il y avait Gahirwa Appolinaire qui a été condamné pour crime de génocide, mais a actuellement purgé sa peine et a été libéré, ainsi que le nommé Gakwandi qui n’a jamais pu être arrêté pour être traduit en justice.
9.Les massacres ont été commis dans d’autres régions du pays
Des massacres ont été perpétrés à la paroisse de Nyarubuye, Rusumo, 3 à 4 000 morts ont été dénombrés : imibare muyisibe ntawe uyizeye. Les tueries étaient organisées par le bourgmestre Sylvestre Gacumbitsi. Le même jour, les Interahamwe ont massacre les Tutsi à Karambi, commune Cyimbogo (Cyangugu). Entre le 10-11 avril, il y a eu le massacre dans l’église de Zaza (Kibungo), plus de 1 000 morts. Le 10 avril, eut lieu le grand massacre à la paroisse de Kiziguro organisé par Jean-Baptiste Gatete, bourgmestre de Murambi, 3 500 à 3 700 morts.
C0NCLUSION
Depuis le 7/4 des Tutsi ont été massacrés, les tueries ont continue dans les jours suivants. Le gouvernement génocidaire mis en place par des extrémistes le 9/4 a continué à inciter au génocide, en se déplaçant dans tous les coins du pays. L’objectif était d’exécuter le plan d’extermination qui existait bien avant le génocide
Fait à Kigali le 10 avril 1994
Dr BIZIMANA Jean Damascène
Secrétaire Exécutif
Commission Nationale de Lutte contre le Génocide (CNLG)